Sunday, November 11, 2012

Voyage



Je finis par me faire à l'idée que je n'atteindrai pas Roissy. On avait annoncé qu'il n'y aurait 

qu'un métro sur deux, et j'en avais tenu compte, mais dans les faits, station Grenelle, cela 

faisait trois quarts d'heure qu'on attendait qu'une rame fasse enfin rugir sa ferraille dans 

l'obscurité du tunnel. Les plus optimistes traversent le quai pour être les premiers à embarquer. 

Mais quand le métro s'arrête, les cabines sont tellement engorgées que les portières ne 

s'ouvrent que pour les rares passagers qui allaient en sortir. Sortir moins pour être arrivés à 

destination que pour échapper à l'étouffement. Quelques téméraires n'hésitent pas à 

s'ensardinner à leurs places. Râler, pester et attendre encore, ou alors renoncer, sortir dans la 

rue pour tenter de prendre un bus ou un taxi qu'on ne trouvera pas, voilà le choix qui s'offrait. 

Mais qu'importe le choix, le vol pour Beyrouth allait décoller. Je choisis de sortir quand même, 

sans conviction. Dans la rue, la fumée noire est partout. Le boulevard de Grenelle est bloqué 

par des monticules de sable et de pneux incendiés. Je rejoins la foule des émeutiers qui 

scandent: "Le peuple - exige - la chute du régime! Le peuple- exige - la chute du régime!..."

Sary Tadros

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